d) Distribution sélective et effet cumulatif

La Commission aura consacré à cette question 3 articles sur un Règlement qui en compte au total 13 ; cela témoigne à l'évidence de sa préoccupation par rapport à un phénomène dont l'existence au plan communautaire n'a jamais été constatée pour la distribution sélective «simple », telle que la pratiquent les fournisseurs de parfums et cosmétiques de luxe (sans exclusivité ni territoriale ni de clientèle, sans obligation de non concurrence).
Le bénéfice de l'exemption générale peut être retiré si la concurrence sur le marché est restreinte de manière significative par l'effet cumulatif de faisceaux parallèles d'accords similaires.
Il appartient à la Commission ou à l’autorité nationale compétente d'établir l'existence de l'effet cumulatif et d'en déterminer la cause.

Selon la Commission :
si le taux de couverture du marché par le même type d' accords n'excède pas 50 %, le risque qu'un effet cumulatif se produise est peu vraisemblable;
si le taux de couverture du marché par le même type d'accords excède 50 % :
- et que la part de marché des cinq entreprises leaders (CR 5), n'excède pas 50 %, le risque qu'un effet cumulatif se produise est peu vraisemblable,
- si le taux de couverture du marché par le même type d'accords excède 50 % et que le CR 5 excède 50 % si les cinq entreprises leaders pratiquent la distribution sélective, il y a un risque de voir se produire un effet cumulatif.
Dans ce cas, la Commission distingue selon qu'il y a :
- sélection quantitative directe c'est à dire limitation directe du nombre de revendeurs notamment par des exclusivités territoriales (effet de forclusion à l'égard des distributeurs) ou combinaison d'un chiffre d'achats minimum avec une exigence de réalisation d'un pourcentage du chiffre d'affaires total du distributeur ou d'un espace réservé de linéaires au sein du magasin (effet de forclusion à l'égard des autres fournisseurs), le risque d'effet cumulatif est alors majeur,
- sélection quantitative indirecte qui peut consister en un chiffre d'achats fixé selon les règles consacrées par les décisions Yves Saint Laurent et Givenchy, le risque d'effet cumulatif est alors moindre.
En cas d'effet cumulatif, trois types d'intervention sont prévus par le Règlement :
le retrait de l'exemption, à l'initiative de la Commission, à une ou plusieurs entreprises à l'origine des effets de concurrence négatifs.
Les décisions individuelles de retrait prises par la Commission peuvent faire l'objet d'un recours devant le TPlCE.
le retrait de l'exemption, à l'initiative d'une autorité nationale de concurrence, à une ou plusieurs entreprises à l'origine des effets de concurrence négatifs, dans le cas où ils se produiraient sur un marché national.
Les décisions individuelles de retrait prises par les autorités nationales sont soumises, quant aux recours aux règles du droit national applicable.
Elles ne peuvent remonter au niveau communautaire par le biais d'une question préjudicielle posée par une juridiction nationale à la CJCE ou par le biais d'une question posée à la Commission CE.


la déclaration d'inapplicabilité du Règlement d'exemption, prise par règlement adopté par la Commission CE, à l'encontre de l'ensemble des entreprises d'un secteur.
La déclaration d'inapplicabilité adoptée par la Commission, par voie de règlement, serait difficilement susceptible de recours devant le TPlCE, faute pour les entreprises de pouvoir justifier d'un intérêt direct et individuel pour agir.
Les entreprises qui en feraient l'objet devraient notifier leur contrat à la Commission pour obtenir une attestation négative ou une exemption individuelle.


• Il est à noter que la Commission précise au paragraphe 189 des lignes directrices qu'un fournisseur dont la part de marché est inférieure à 5% n'est engénéral pas considéré comme contribuant de manière significative à un effet cumulatif.



e) Distribution sélective et nature du produit

• La définition de la distribution sélective donnée par le Règlement d'exemption par catégories ne fait plus référence à des critères objectifs de nature qualitative qui seraient dictés par la « nature» des produits mais à des critères «définis ».
On pourrait donc envisager de mettre en oeuvre la distribution sélective pour n'importe quel type de produit.
• Cependant, la Commission s'est laissé la possibilité dans les lignes directrices d'opérer un retrait d'exemption si, au-dessous de 30 % de part de marché, en cas de combinaison de la distribution sélective avec des clauses d'exclusivité ou de non-concurrence, la distribution sélective n'est pas justifiée par la nature des produits.

Les pratiques contractuelles exemptées dans les décisions Yves Saint Laurent et Givenchy et/ou validées par les arrêts Galec ne sont pas remises en cause par le Règlement 2790/1999.
Dire si les fournisseurs utiliseront le « mecano » que la Commission met à leur disposition avec les combinaisons autorisées de la distribution sélective avec les clauses d'exclusivité territoriale ou de clientèle, ou avec les obligations de non-concurrence, paraît difficile tant elles semblent aujourd'hui éloignées de ce qui fait l'originalité du caractère ouvert que la distribution sélective revêt dans notre secteur.
L'avenir nous dira si certains se sont laissés tenter par l'appel de ces nouveaux espaces de liberté...


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