Commission juridique du CEDRE et cabinet Vogel & Vogel Mercredi 11 décembre 2013 : E-commerce et franchise
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Le CEDRE vous invite à sa prochaine commission juridique
THEME : " E-commerce et franchise "
Le Mercredi 11 décembre 2013 (de 17h à 21h)
LIEU : Cabinet Vogel & Vogel - 30, avenue d’Iéna 75116 Paris
Le thème de cette commission juridique est évidemment d’actualité. La jurisprudence est abondante sur ce sujet et il était temps d’en faire un état des lieux. Trop souvent, les rapports franchiseur / franchisé sont pollués par la mise en place, par le franchiseur, de la distribution de ses produits par le canal d’Internet. Comment harmoniser et dynamiser ces rapports dans l’intérêt supérieur du réseau ? Venez avec nous faire le point, et n’hésitez pas à poser vos questions. |
L'accès aux commissions est réservé aux franchiseurs, directeurs de réseaux, franchise managers (développeurs et animateurs), et service juridique interne.
PROGRAMME
17h00: Accueil des participants
17h15: Introduction : Retail vs e-commerce
Olivier Gast, Président du CEDRE et conseil expert en franchise
17h30: Etat des lieux :
- Réglementaire (Règlement Européen des accords verticaux 2010 et droit de la concurrence)
- Jurisprudentiel
18h00: Le contrôle de l'e-commerce du franchisé par le franchiseur
(Le franchiseur peut-il interdire à son franchisé d'effectuer des ventes par Internet ?)
Me Joseph Vogel, avocat fondateur cabinet Vogel & Vogel
18h30: Le contrôle de l'e-commerce du franchiseur par son franchisé
(Le franchisé peut-il interdire à son franchiseur de le concurrencer sur son territoire, par des ventes sur Internet)
Me Joseph Vogel, avocat fondateur cabinet Vogel & Vogel
19h00: Table ronde : Moderator (Sud Express)
"L'e-commerce conjoint du franchiseur et du franchisé : comment ça marche ?"
M. Olivier Adraste, directeur financier Sud Express
19h30: Conclusion et cocktail
COMPTE RENDU GENERAL
Intervention d’Olivier Gast – Introduction
Avec internet : « I have a dream ! »
Je rêverais en tant que consommateur que tous les produits soient à - 50% et livrés chez moi d’une part, et qu’il existe des showrooms où j’irais me promener et m’informer d’autre part.
A la une des Echos du 4 décembre 2013, il apparaît que, d’ici 2020, les ventes sur internet devraient augmenter de 50% dans la distribution spécialisée, on entend déjà parler de « showrooming », de « magasins zombies ».
Il existe, à cet égard, deux façons de voir les centres commerciaux :
- L’exemple d’Unibail : ils investissent dans de supers centres commerciaux, de grande qualité, lesquels ont été entièrement rénovés. Toutefois, il existe un risque, non négligeable, que les gens s’y promènent mais n’y consomment pas !
- A l’inverse, demeurent les centres commerciaux traditionnels qui n’ont pas été rénovés mais paraissent alors « ringards » et sont en chute libre.
Il s’agit ainsi d’une nouvelle réflexion, d’une redistribution ; en d’autres termes, d’un nouvel algorithme. Internet va détruire des pans entiers de la distribution spécialisée et du retail.
Le grand débat d’aujourd’hui est la conjugaison entre le réseau de franchise traditionnel et le projet de e-commerce. Quelles sont les conséquences pour les franchisés ?
Dans les Echos de ce jour (11 décembre 2013), on apprend que le gouvernement ouvre la voie à la libéralisation de l’optique. On pourra désormais ouvrir un magasin d’optique sans pour autant être opticien, sous réserve d’avoir un salarié opticien dans le magasin. (voir l’édito du rapport d’activités du CEDRE de décembre 2013)
Ainsi, une simple réglementation peut tout changer. Il faut donc être aux aguets et bien appréhender sa stratégie commerciale, notamment au regard de son réseau de franchise. Les choses vont très vite. La créativité s’accélère et mondialement par-dessus le marché (voir le compte rendu de la commission juridique du CEDRE du 5 avril 2011). Lors de notre dernière commission sur la franchise et internet, en avril 2011, nous évoquions les web agency et la nécessité de séduire les consommateurs peu habitués aux achats en ligne !
Je ne tiens pas un discours pessimiste mais il faut être très attentif quant à « l’impermanence » du futur, une simple réglementation peut déstabiliser tout un secteur (à l’instar du marché de l’optique). Les stratégies sont bien évidemment différentes selon les produits et services vendus (il paraît encore difficile pour un coiffeur de proposer ses services en ligne, par exemple !), tout n’est pas généralisable.
Je laisse la parole à Joseph Vogel, avocat spécialiste de ces questions.
Intervention de Joseph Vogel - " E-commerce et franchise " : enjeux et problèmes juridiques
Il convient de commencer par un état des lieux de la réglementation en vigueur (I), avant d’examiner les points suivants :
- Le contrôle de l'e-commerce du franchisé par le franchiseur (II)
- Le contrôle de l'e-commerce du franchiseur par son franchisé (III)
- L'e-commerce conjoint du franchiseur et du franchisé : comment ça marche ? (IV)
I. ETAT DES LIEUX
D’où vient le droit qui réglemente les ventes par Internet au sein d’un réseau de distribution organisé, comme la franchise ?
Le régime des ventes par Internet au regard des contrats de distribution, des contrats de franchise notamment, fait l’objet en droit positif de deux sources de droit.
La première est le droit européen : deux règlements applicables à tous les contrats de distribution se sont succédés (ancien règlement n°2790/1999 du 22 décembre 1999; nouveau règlement n°330/2010 du 20 avril 2010 sur l'application de l'article 101§3 TFUE aux accords verticaux), accompagnés de lignes directrices (lignes directrices de la Commission relatives aux restrictions verticales du 19 mai 2010). Ces textes consacrent plusieurs pages à la réglementation des ventes par Internet. C’est la première source de droit étant précisé que le droit français s’inspire lui-même énormément du droit européen, même lorsqu’il n’est pas applicable.
La deuxième source est d’origine jurisprudentielle.
A. Le droit réglementaire européen
L’adoption du règlement de 1999 fut à l’origine d’une grande bataille entre les pure players et le secteur du luxe sur l’équilibre à trouver entre liberté du e-commerce et sauvegarde des réseaux de distribution. Il y eut un important lobbying à Bruxelles et nombreux furent les débats opposant deux conceptions radicalement opposées, à savoir la volonté d’autoriser les pure players à vendre librement tous les produits par Internet d’une part, et la volonté de réglementer très strictement et interdire la vente de produits sous contrat de distribution (franchise notamment) aux pure players d’autre part.
La Commission a choisi une voie intermédiaire : il est interdit d’interdire la vente par Internet, mais on peut l’encadrer. C’est l’équilibre mis en place par le règlement de 1999 qui existe toujours aujourd’hui. L’interdiction faite à ses distributeurs, franchisés, de vendre par internet constitue une restriction caractérisée. Or, il n’y a quasiment aucune chance qu’une telle restriction puisse être exemptée.
En revanche, les fournisseurs peuvent exclure les pure players du réseau. En effet, le fournisseur peut exiger de ses distributeurs qu’ils aient au moins un point de vente physique pour pouvoir vendre par internet.
La Commission est très attentive à la mise en œuvre de ce régime. Ainsi, le 5 décembre dernier, elle a fait procéder à des inspections dans les locaux de plusieurs entreprises européennes soupçonnées d'avoir mis en place des restrictions à la vente en ligne de produits électroniques et de petit électroménager. Quelques semaines auparavant, l’Autorité de la concurrence a perquisitionné auprès de plusieurs fabricants et distributeurs d'électroménager pour les mêmes motifs.
B. La jurisprudence
L’Autorité de la concurrence (alors Conseil de la concurrence) s'était saisie d'office, le 27 juin 2006, de pratiques dans le secteur de la distribution des produits cosmétiques et d'hygiène corporelle, en l’occurrence des restrictions de vente active ou passive qui posaient le problème de l'interdiction totale de la vente sur Internet ou des conditions trop restrictives imposées par les fabricants à leurs distributeurs agréés. Tous les contrats du secteur ont été analysés de façon extrêmement précise. Dans ce cadre, tous les fournisseurs ont pris des engagements, sauf la société Pierre Fabre qui a refusé de trouver un accord avec l’Autorité. La société stipulait dans ses contrats de distribution sélective une clause aux termes de laquelle était exigée la présence d’une personne titulaire du diplôme de pharmacie pour assurer la vente, ce qui exclut les ventes en ligne.
A la suite d’une question préjudicielle posée par la cour d’appel de Paris, la CJUE a rendu un arrêt Pierre Fabre en vertu duquel une interdiction de vente sur Internet dans un contrat de distribution sélective constitue une restriction « par objet » contraire à l’article 101§1 TFUE, sauf justification objective tenant aux propriétés du produit. On ne peut donc pas interdire directement ou indirectement les ventes par internet.
La Cour reconnaît certes qu’une telle clause puisse bénéficier d’une exemption individuelle mais les conditions sont si restrictives qu’il est quasiment impossible d’en bénéficier.
L’arrêt pose une restriction a priori ; or, une appréciation au cas par cas aurait été préférable. Dans ce cas, la clause n’aurait sans doute pas été interdite. En effet, la société Pierre Fabre n’avait pas d’importantes parts de marché, les arguments au soutien de sa position se défendaient (conseil spécialisé, etc.) et l’ensemble de ses concurrents autorisaient la vente en ligne.
Toutefois, c’est la position de la jurisprudence et l’on peut penser qu’elle restera encore ainsi plusieurs années. D’ailleurs, la jurisprudence intervenue entretemps va dans le même sens, à l’instar de la décision de l’Autorité de la concurrence du 12 décembre 2012 dans une affaire Bang et Olufsen. Ou du dernier arrêt rendu dans l’affaire Pierre Fabre (31 janvier 2013) où la cour d’appel de Paris juge qu’il existe une "possibilité d’assurer le respect de la qualité des produits et un conseil personnalisé au client via internet et donc de concilier la préservation de la qualité et de l’usage des produits et la vente en ligne desdits produits par les distributeurs agrées".
II. LE CONTROLE DE L’E-COMMERCE DU FRANCHISE PAR LE FRANCHISEUR
Le franchiseur peut-il interdire à son franchisé d’effectuer des ventes par Internet ou réglementer de telles ventes?
Il est interdit d’interdire les ventes par internet au franchisé. En revanche, la distribution sur Internet peut faire l’objet de restrictions qui tendent, en réalité, à la préservation du réseau de franchise.
A. Les modalités reconnues
De prime abord, dans un système de distribution exclusive, le fournisseur peut interdire les ventes actives hors zone. On peut donc interdire dans un tel système les ventes actives en ligne. La publicité ciblée ou la rémunération d’un moteur de recherche pour capter spécifiquement telle clientèle protégée par une clause d’exclusivité sont des ventes actives en ligne qui peuvent, dès lors, être interdites. Cela ne vaut toutefois que pour la distribution exclusive.
Plus généralement, le fournisseur peut :
- Imposer des standards de qualité.
- Appliquer des conditions équivalentes pour les points de vente physiques et la distribution en ligne.
- Imposer un ou plusieurs magasins en dur.
- Prévoir un chiffre d’affaires minimum dans les magasins en dur : cela permet de lutter contre la fraude (ce serait trop facile pour un distributeur d’ouvrir un faux magasin).
- Faire payer une redevance fixe pour favoriser les efforts de vente.
Exemples : imposer une charte graphique, présentation des produits sur une page dédiée, etc.
Pour davantage de précisions, il convient de se reporter aux lignes directrices de la Commission qui précisent ce qu’un fournisseur a le droit de faire ou non. L’Autorité de la concurrence est allée encore plus loin dans ses décisions et avis sur la hotline notamment où elle détaille ce qu’un fournisseur peut faire ou non concernant les délais de réponse ou la gestion des stocks par exemple. L’Autorité essaie de trouver un juste milieu entre qualité du service et liberté de la vente. Sur la langue, elle estime que peut être imposée l’utilisation d’une langue facilement comprise dans l’hypothèse où un client étranger poserait une question en ligne. Sur le contrôle du fournisseur, elle estime qu’il est légitime si sont vendus plus de 10 produits (probabilité d’un revendeur hors réseau), à défaut il n’a pas le droit de contrôler.
Aussi est-ce un juste équilibre qui est recherché par l’Autorité de la concurrence, laquelle procède à un bilan ; il est en revanche interdit de réglementer trop restrictivement de telle sorte que la restriction s’assimile à une interdiction.
B. Les modalités contestées ou discutées
1. Les prix duals
Il s’agit de la pratique consistant pour un fournisseur à vendre à un distributeur à un prix différent selon que la vente se fait dans un magasin physique ou bien par internet. La Commission est très hostile à cette pratique. Cependant, il paraît légitime d’accorder des rémunérations de prestations de service si le distributeur rend en magasin physique un service particulier qu’il ne rend pas sur Internet. Il peut s’agir, par exemple, d’une remise d’exposition ou d’une remise pour aide à la revente (conseil personnalisé).
La Commission est hostile à de telles pratiques dans la mesure où elle considère qu’elles découragent les ventes par internet.
L’on peut cependant faire valoir que de telles pratiques sont légales sous réserve que la rémunération soit proportionnée au service rendu. Il ne faut pas rembourser plus que nécessaire.
2. Les pourcentages de ventes
Cette clause est déconseillée car elle est interdite par les lignes directrices (§ 52-c). S’il est possible de prévoir un chiffre d’affaires minimum, cela n’est pas le cas pour un pourcentage de ventes minimum. Certaines cours, à l’instar de la Cour Suprême Fédérale allemande, ont adopté par le passé une position différente, mais compte-tenu de l’hostilité des lignes directrices publiées entretemps, il est préférable de ne pas recourir à cette restriction.
3. L’interdiction des ventes sur des plateformes d’enchères en ligne type eBay
C’est une question très discutée. Il est recommandé de recopier in extenso dans ses contrats la clause qui figure dans les lignes directrices.
« De même, un fournisseur peut exiger que ses distributeurs ne recourent à des plateformes tierces pour distribuer les produits contractuels que dans le respect des normes et conditions qu'il a convenues avec eux pour l'utilisation d'internet par les distributeurs. Par exemple, si le site internet du distributeur est hébergé par une plateforme tierce, le fournisseur peut exiger que les clients n'accèdent pas au site du distributeur via un site qui porte le nom ou le logo de la plateforme tierce » (§ 54).
La tendance générale des fournisseurs est surtout d’exclure les pure players du réseau pour protéger les circuits traditionnels de distribution spécialisée. En ce sens, il est utile de rémunérer les services rendus dans les points de vente physiques. La question relève toutefois des propres choix des fournisseurs et têtes de réseaux. Eu égard à la progression des ventes par Internet, il est certain qu’existe une certaine pression pour accepter les pure players dans le réseau, notamment Amazon. Tout dépend de la politique commerciale choisie.
III. LE CONTRÔLE DE L’E-COMMERCE DU FRANCHISEUR PAR LE FRANCHISÉ
Le franchisé peut-il interdire à son franchiseur de le concurrencer sur son territoire, par des ventes sur Internet?
Les clauses d’exclusivité territoriale ne sont pas de l’essence des contrats de franchise. Toutefois, nombreux sont les réseaux de franchise où sont stipulées de telles clauses dans les contrats (Olivier Gast précise, toutefois, que plus de la moitié des contrats de franchise aujourd’hui ne prévoient pas de clause d’exclusivité).
Avec une clause d’exclusivité territoriale, le franchiseur concède un territoire géographique contractuellement défini au franchisé en lui réservant une exclusivité d'enseigne et ou de produits.
Or, si le franchiseur crée un site internet, il ne pourra pas refuser de vendre à des clients sous prétexte qu’ils relèvent de la zone d’exclusivité d’un franchisé. L’affaire « Flora Partner » illustre cette problématique.
A. Illustration : l’affaire « Flora Partner »
En l’espèce, un franchiseur avait concédé à un franchisé le droit exclusif d'exploiter, pendant un certain délai, sous la marque, l'enseigne et les techniques « Le jardin des fleurs » (concurrent de Monceau Fleurs précise Olivier Gast), un magasin situé dans le sixième arrondissement de Marseille.
Aux termes des stipulations du contrat:« l'exclusivité territoriale implique que le franchiseur s'engage, pendant la durée du présent contrat, à ne pas autoriser l'ouverture d'autres points de vente Le jardin des fleurs dans le territoire d'exclusivité susmentionné, en dehors de celui du franchisé ».
Le franchiseur ayant ouvert un site Internet sous la même enseigne, le franchisé a alors intenté une action en résiliation du contrat de franchise et en paiement de dommages-intérêts.
L’affaire ayant été portée devant la cour d’appel de Bordeaux, celle-ci a jugé dans un arrêt du 26 février 2003 que :
« Même en considérant qu'il s'agit d'une vente passive, puisque le client visite le site du franchiseur, la vente par Internet porte atteinte à l'exclusivité du franchisé dès lors qu'elle est réalisée sans contrepartie financière pour le franchisé, qui cependant contribuait au fonctionnement du site par prélèvement effectué sur la redevance de communication réglée par lui par le franchisé ».
A l’inverse, la Chambre commerciale de la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel aux motifs que « le contrat souscrit par les parties se bornait à garantir au franchisé l'exclusivité territoriale dans un secteur déterminé et la création d'un site Internet n'est pas assimilable à l'implantation d'un point de vente dans le secteur protégé » (Cass. Com. 14 mars 2006).
Pour la Cour de cassation, il n’y a pas de violation de l’exclusivité car le franchiseur s’était simplement engagé à ne pas créer de point de vente dans la zone concédée.
La Cour a répondu par une interprétation du contrat de franchise au visa de l’article 1134 du code civil. Le débat aurait pu également se placer sur le terrain du droit de la concurrence et sur l’interdiction de toute protection territoriale absolue.
B. Le principe de la qualification de ventes passives des ventes en ligne
Le cloisonnement total de chaque territoire est interdit par le droit de la concurrence. Un client final doit toujours avoir le droit d’acheter auprès de chaque distributeur sur chaque territoire.
Ventes actives : le franchiseur sollicite le client situé à l’intérieur du territoire réservé à un franchisé (publipostage, envoi de courriels non sollicités, annonces publicitaires dans les médias, ou autres actions de promotion ciblées sur cette clientèle ou sur les clients situés dans ce territoire…).
Ventes passives : le franchiseur se contente de répondre à des demandes non sollicitées, émanant de clients individuels situés en dehors de sa zone commerciale concédée.
Pour les lignes directrices, les ventes par internet sont des ventes passives sauf si elles sont ciblées sur une clientèle (§52).
Quelques conseils pratiques sur ce point :
- Autoriser par précaution les ventes par Internet dans le contrat tant pour le franchiseur que pour le franchisé ;
- Être très rigoureux dans la rédaction de la clause (dans l’affaire « Flora Partner » la solution était commandée par les termes retenus dans le contrat de franchise en cause) ;
- Veiller à ce que la clause soit équilibrée;
- Soumettre l’ouverture d’un site internet d’un franchisé à agrément préalable du franchiseur en vue de vérifier le respect des conditions qualitatives à remplir par le site;
- Prévoir de manière détaillée les modalités de vente des produits sur Internet: support de vente, charte qualité, charte graphique, communication, etc
IV. « L’E-COMMERCE CONJOINT DU FRANCHISEUR ET DU FRANCHISÉ: COMMENT ÇA MARCHE? »
Quels sont les problèmes juridiques soulevés par un site internet commun entre le Franchiseur et le Franchisé ?
Le franchiseur et franchisé peuvent aussi collaborer. C’est encore assez rare car aujourd’hui les sites communs sont, pour beaucoup, des sites institutionnels ou informatifs de la marque ouverts aux distributeurs, avec le cas échéant quelques ventes flash (notamment pour les sites internet en matière de distribution automobile). Mais on peut aller plus loin et créer un site transactionnel commun. Cela nécessite beaucoup de travail car tout le droit de la consommation, le droit de la distribution, le droit de la concurrence mais aussi le droit civil et commercial classique doivent être respectés en tout état de cause. Certaines de ces difficultés méritent qu’on s’y attarde.
A. Sur la qualification de « vente à distance »
Le fait que la vente soit conclue sur le site internet a des implications en termes de protection du client consommateur (art. L.121-16 à L.121-20-7 du code de la consommation). Le droit de la consommation en France est très restrictif, et sera encore renforcé en cela par le projet de loi « Hamon » sur la consommation.
Exemples :
Les informations permettant d’identifier et de contacter le vendeur, les modalités de paiement et de livraison, les frais éventuels, etc. doivent être indiquées sur le site (C.Conso. Art. L.121-18)
Il existe un droit de rétractation du consommateur, délai de 7 jours (contre 14 jours dans le projet de loi « Hamon »).
B. Sur les prix imposés
Il faut faire très attention à ce que le site internet ne soit pas un moyen pour le franchiseur d’imposer un prix fixe ou minimum aux franchisés. A défaut, il s’agit d’une clause noire qui fait perdre le bénéfice de l’exemption par catégorie (article 4 du Règlement d’exemption n°330/2010).
Les lignes directrices du 19 mai 2010 ont procédé à un relatif assouplissement en prévoyant que :
« Les prix de vente imposés peuvent ne pas avoir pour seul effet de restreindre la concurrence […] et peuvent aussi […] entraîner des gains d’efficience » (§225).
Toutefois, les gains d’efficience seront sans doute très difficilement reconnus en pratique. Si les lignes directrices donnent pour exemple les opérations promotionnelles ponctuelles de courte durée (2 à 6 semaines) organisées dans le cadre d’un système de franchise notamment, il reste que dans 99 à 99,9% des cas, une pratique de prix imposés fera perdre le bénéfice de l’exemption par catégorie.
Rappelons, qu’en tout état de cause, le distributeur doit pouvoir faire des opérations promotionnelles sans autorisation du fournisseur.
Pour caractériser une pratique de prix imposés, l’Autorité de la concurrence procède à un triple test :
Les trois critères du test sont:
- Une évocation des prix entre les parties sous quelque forme que ce soit ;
- Une application significative des prix par les distributeurs ;
- La mise en œuvre de mesures de police ou de mesures de surveillance.
Les autorités françaises se contentent d’indices limités pour considérer que chaque critère est rempli. Mais l’infraction d’entente ne sera caractérisée que si les trois conditions sont remplies.
Attention : un fournisseur ne peut pas demander à son distributeur d’augmenter ses prix sous peine de résiliation du contrat, de perte de prime de fin d’année, etc. Il ne peut pas non plus lui reprocher de ne pas être assez rentable et lui demander de revendre à un prix minimum pour renforcer cette rentabilité. Aussi convient-il d’être très vigilant, d’autant plus que les contrôles des enquêteurs peuvent être très intrusifs.
Ainsi, il est envisageable de mentionner sur le site une référence à un prix conseillé ou à un prix maximum, le franchisé devant rester libre, malgré cette référence, de pratiquer le prix de son choix. Le site doit permettre au distributeur de modifier le prix (l’important c’est qu’il puisse le faire même si en pratique il s’abstient de le faire compte-tenu de l’adéquation du prix conseillé au marché).
Le client ne pourra connaître le prix définitif qu’après avoir opté pour le franchisé de son choix.
C. Sur la perception du prix par le franchiseur au nom et pour le compte du franchisé
Le site Internet est commun. Mais (a priori) c’est le franchisé qui juridiquement vend aux consommateurs.
L’idée est que le client règle le prix en ligne mais que tous les paiements soient centralisés.
Le prix sera perçu par le franchiseur (via le module de paiement sécurisé mis en place par le franchiseur sur le site) au nom et pour le compte du franchisé. Pour cela, il faut prévoir un mandat du franchisé au bénéfice du franchiseur.
Cela fonctionne en pratique.
Sur le risque de mise en jeu de la responsabilité du franchiseur.
Le site Internet est commun mais c’est le franchisé qui vend aux consommateurs. Toutefois, en cas de livraison incomplète ou de mauvais conseil, le premier réflexe du consommateur sera d’agir contre le fournisseur. Or, ce dernier n’a qu’un mandat d’encaissement et non de vente. Il est donc nécessaire de séparer précisément le rôle de chacun pour éviter la confusion et la mise en cause de la responsabilité du franchiseur en cas d’inexécution ou mauvaise exécution du contrat de vente imputable au franchisé.
D. Sur les livraisons à l’étranger pour les commandes passées par Internet
Il faut éviter de restreindre les ventes, notamment en Suisse (car c’est alors le droit suisse de la concurrence qui s’applique). Le franchisé doit être libre de vendre à toute clientèle nationale comme étrangère. Le mieux c’est de viser très très large (hors éventuelle interdiction de vendre à des clients situés hors territoire de l’UE, de l’EEE et de l’AELE).
Ainsi, le franchisé doit pouvoir vendre en Croatie s’il le souhaite. S’il ne le souhaite pas, alors il doit l’indiquer très clairement sur le site. Mais cela relève de son propre choix.
E. Problèmes pratiques
Les flux financiers entre le franchiseur, le franchisé et le consommateur devront être clairement et précisément déterminés ; de même que le schéma de facturation et l’émission des factures entre ces personnes.
A la suite de la conférence, s’est instauré un débat avec la salle avec de nombreuses questions et un partage d’expériences des réseaux présents sur leur expérience en matière d’e-commerce, débat qui s’est prolongé par le traditionnel cocktail.
QUELQUES ENSEIGNES INSCRITES
La FNAC, Body Minute, FBD Group (Ixina, Cuisines Références, Cuisine Plus), Gemofis, Guinot, Hediard, Karting, Zapa, etc...