Dîner-Débat du 2 mars 2003 : La reforme des baux commerciaux aura-t-elle lieu ?
Le Ministre de la Justice, Dominique PERBEN, souhaite entreprendre une véritable transformation du statut des baux commerciaux, qui vient de fêter ses 50 ans.
Le régime instauré en des temps de pénurie des baux commerciaux et d'inflation monétaire par le décret du 30 septembre 1953 ne correspond plus, selon lui, aux besoins actuels et aux nouvelles formes de commercialités. Il est également l'une des causes de l'encombrement des tribunaux.L'un des principaux axes de cette réforme serait de supprimer ce droit au bail qui crée une inflation artificielle du prix des fonds de commerce, ce qui faciliterait ainsi la création d'entreprises.
Le Ministre de la Justice envisage aussi de faciliter la reprise par les bailleurs des logements d'habitation, souvent inoccupés, qui sont attachés aux fonds de commerce. Cela permettrait de solutionner, en partie, la crise du logement locatif actuel.
Le groupe de travail mis en place par Dominique PERBEN, présidé par Maître Philippe PELLETIER, ancien Président de l'U.N.P.I., doit également engager une réflexion sur le champ d'application des baux commerciaux.
En effet, aujourd'hui, toutes les locations commerciales sont soumises au même statut. Or, suivant le secteur d'activité dans lequel l'on se trouve, elles présentent des caractéristiques diamétralement opposées.
L'on pense notamment aux bureaux, plates-formes logistiques et grandes surfaces, qui pourraient bénéficier d'une plus grande souplesse.
Le Garde des Sceaux affirme qu'il souhaite rééquilibrer les rapports entre les locataires et les bailleurs et renforcer le principe de la volonté des parties sans pour autant abandonner les garanties nécessaires à chacune d'elle.
Ce projet de réforme a entraîné de fortes réactions de la part des fédérations de commerçants, qui sont parvenues à faire modifier la composition de la Commission PELLETIER, qui compte désormais un plus grand nombre de représentants du commerce.
Le droit au bail représente une part importante de l'actif du bilan des petits commerçants. Il contribue donc à l'obtention des crédits lors de la création d'une entreprise puisque, en tant qu'élément du fonds de commerce, il peut faire l'objet d'un nantissement.
La durée de neuf ans des baux commerciaux permet également aux commerçants d'assurer une certaine sécurité, nécessaire à l'amortissement des investissements engagés lors de la création du fonds de commerce.
Le plafonnement des loyers permet d'éviter leur inflation. D'aucuns prétendent ainsi que cette réforme aurait pour unique but de favoriser les propriétaires immobiliers au détriment des petits commerçants.
Pourtant, il ne fait aucun doute que la suppression du droit au bail permettrait de relancer la création d'entreprises, notamment en ce que la législation française serait en harmonie avec la majorité des législations des Etats membres de la Communauté européenne, ce qui permettrait ainsi de lever un obstacle à l'investissement des étrangers sur notre territoire.
Cependant, un tel bouleversement de la législation des baux commerciaux aurait des conséquences dans d'autres domaines.
L'on pense plus particulièrement aux fonds de commerce, dont le régime découle pour l'essentiel d'une loi encore plus ancienne que le décret de 1953 : la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce.
Il semble donc qu'une réforme du statut des baux commerciaux doive être accompagnée d'une refonte totale du régime des fonds de commerce, qui n'est plus adapté non plus aux modes de commerce d'aujourd'hui.
Les conclusions du groupe de travail devraient être remises à la fin du mois d'avril.