Atelier du CEDRE Mercredi 5 octobre 2011 : Le savoir-faire : le passager clandestin de la franchise ?!
L'approche américaine du savoir-faire dans les contrats de franchise
LE CEDRE VOUS INVITE A SON PROCHAIN ATELIER
LE MERCREDI 5 OCTOBRE 2011
À 17H PRÉCISE
THEME :
« LE SAVOIR-FAIRE : LE PASSAGER CLANDESTIN DE LA FRANCHISE ?! »
Animé par Olivier Gast, Président du CEDRE
Les plus grandes franchises sont américaines...c'est un fait. Pourtant, la notion de savoir-faire est inexistante dans la définition américaine de la franchise ainsi que dans sa règlementation. Pourquoi ? Cette question devrait nous interpeller tant d'un point de vue juridique et doctrinal que scientifique ! En France, la notion de savoir-faire est "la" condition première pour identifier une franchise. La Jurisprudence de nos tribunaux fait rage et cette question "shakespearienne" savoir-faire ou pas savoir-faire!" est devenue un vrai débat d'experts ! Nous étudierons entre autre la dernière jurisprudence de la Cour de Cassation du 1er mars 2011 (Affaire Pétrin Ribeirou). Le savoir-faire est-il un "passager clandestin de la franchise ?!" |
17h00 : Accueil des participants
17h15 : Introduction : Pour une approche comparée de la franchise aux USA et en France
Olivier Gast, Président du CEDRE
17h45 : Approche européenne du savoir-faire dans les contrats de franchise (analyses et commentaires des règlements européens d'exemption des accords de franchise)
François Farkas, Juriste, Gast & Menguy
18h30: L'approche jurisprudentielle française du savoir-faire dans les accords de franchise
Me Gilles Menguy, Avocat & Solicitor, Gast & Menguy
Me Olivia Gast, Avocat à la Cour, Gast & Menguy
19h30 : Approche américaine de la franchise
Pourquoi le savoir-faire n'entre-t-il pas ni dans la définition américaine, ni dans la règlementation américaine de la franchise ?
Me Andrew Caffey, Avocat à Washington DC, spécialiste américain de la franchise
20h15 : Table Ronde : Règlement européen et conception de l’OMC sur le savoir-faire : Mise en cohérence
20h45 : Conclusion et cocktail
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17h15 : Introduction : Pour une approche comparée de la franchise aux USA et en France
Olivier Gast, Président du CEDRE
17h45 : Approche européenne du savoir-faire dans les contrats de franchise (analyses et commentaires des règlements européens d'exemption des accords de franchise)
François Farkas, Juriste, Gast & Menguy
18h30: L'approche jurisprudentielle française du savoir-faire dans les accords de franchise
Me Gilles Menguy, Avocat & Solicitor, Gast & Menguy
Me Olivia Gast, Avocat à la Cour, Gast & Menguy
19h30 : Approche américaine de la franchise
Pourquoi le savoir-faire n'entre-t-il pas ni dans la définition américaine, ni dans la règlementation américaine de la franchise ?
Me Andrew Caffey, Avocat à Washington DC, spécialiste américain de la franchise
20h15 : Table Ronde : Règlement européen et conception de l’OMC sur le savoir-faire : Mise en cohérence
20h45 : Conclusion et cocktail
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Pour le 1er atelier de la rentrée du CEDRE, le Club a mis la barre assez haut sur la compréhension juridique et théorique de la franchise. Seuls des experts pointus (et il y en a peu dans le monde de la franchise !) ont pu apprécier la finesse du raisonnement en droit comparé de la notion de savoir-faire dans les définitions américaines et françaises de la franchise. Sans oublier que le nouveau règlement d’exemption du 20 avril 2010 aura des conséquences sur le grand débat judiciaire actuel : peut-on faire annuler un contrat de franchise pour défaut de savoir-faire ? Qu’est-ce que le savoir-faire ? Les arrêts «Pétrin-Ribeirou » sont significatifs du goût français pour le débats sur « le sexe des anges »
Pour calmer le jeu, j’ai tenu par l’analyse de la définition américaine de la franchise à rappeler à l’ordre nos beaux esprits théoriques français.
Olivier Gast
Président du CEDRE
Pour calmer le jeu, j’ai tenu par l’analyse de la définition américaine de la franchise à rappeler à l’ordre nos beaux esprits théoriques français.
Olivier Gast
Président du CEDRE
Me Andrew Caffey, Avocat à Washington DC, spécialiste américain de la franchise
Olivier Gast, Président du CEDRE
François Farkas, Juriste, Gast & Menguy
Me Olivia Gast, Avocat à la Cour, Gast & Menguy
Olivier Gast, Président du CEDRE
François Farkas, Juriste, Gast & Menguy
Me Olivia Gast, Avocat à la Cour, Gast & Menguy
Compte-rendu technique de l'atelier du CEDRE
Introduction : Olivier Gast, Président du CEDRE
Voir le blog de septembre d’Olivier Gast « Franchise, savoir-faire et sexe des anges ! »
Le savoir-faire occupe une place d’importance dans le contrat de franchise en droit français. Traditionnellement, la définition du savoir-faire retenue par les juges et par la doctrine ne comprend que les trois aspects suivants :
- mettre à la disposition du franchisé les droits de propriété intellectuelle : nom commercial, enseigne, marque, sigle… ;
- la communication au franchisé par le franchiseur de son concept au franchisé ;
- une relation continue (assistance permanente).
Il s’avère cependant que cette définition classique du savoir-faire contient une certaine faiblesse due à l’absence de prise en compte de la réalité économique du contrat de franchise. Il s’agit d’un contrat complexe par nature qui s’exécute de façon continue et par lequel le franchisé essayera de réitérer le concept réussi du franchiseur. Pour ce faire, il ne s’agit pas de communiquer tout simplement un procédé au franchisé. Il ne s’agit pas non plus de le placer sous tutelle. Le juste milieu entre ces deux extrêmes consisterait dans l’assistance continue du franchisé. Cette assistance continue, comme Olivier Gast le préconisait déjà en 1995, doit porter non seulement sur les éléments traditionnels du savoir-faire (transmission des droits de propriété intellectuelle et transmission du concept du franchiseur), mais principalement sur le savoir-faire d’organisation du franchiseur. (Article "Playdoyer pour une révision de la notion de savoir-faire en matière de franchise : "du savoir-faire au savoir-réussir" par Olivier Gast - Les Petites Affiches - Novembre 1993").
La nécessité de compléter la notion classique du savoir-faire se vérifie également lorsqu’on se place du point de vue de l’ensemble du réseau. En effet, la transmission d’un savoir-faire d’organisation permettrait de rendre compte à la fois de l’ensemble des franchisés et de l’indépendance de chacun en vue du développement harmonieux du réseau entier.
Outre ces éléments, Olivier Gast justifie le besoin de compléter la définition du savoir-faire d’un point de vue juridique. En effet, de manière schématique, le droit d’entrée versé par le franchisé au franchiseur au début du contrat de franchise correspondrait à une première transmission du savoir-faire par le franchiseur portant sur des éléments nécessaires pour le début de son activité. Au cours du contrat, les versements mensuels des royalties correspondraient à la contrepartie de l’assistance continue du franchiseur.
Le nouveau règlement européen d’exemption du 20 avril 2010, au travers d’une généralisation de la notion du savoir-faire (I), semble pouvoir conduire le juge français à faire évoluer la définition du savoir-faire dans les contrats de franchise (II). Il n’en reste pas moins que, outre-Atlantique, le savoir-faire est totalement exclu de la définition de la franchise (III).
Le savoir-faire occupe une place d’importance dans le contrat de franchise en droit français. Traditionnellement, la définition du savoir-faire retenue par les juges et par la doctrine ne comprend que les trois aspects suivants :
- mettre à la disposition du franchisé les droits de propriété intellectuelle : nom commercial, enseigne, marque, sigle… ;
- la communication au franchisé par le franchiseur de son concept au franchisé ;
- une relation continue (assistance permanente).
Il s’avère cependant que cette définition classique du savoir-faire contient une certaine faiblesse due à l’absence de prise en compte de la réalité économique du contrat de franchise. Il s’agit d’un contrat complexe par nature qui s’exécute de façon continue et par lequel le franchisé essayera de réitérer le concept réussi du franchiseur. Pour ce faire, il ne s’agit pas de communiquer tout simplement un procédé au franchisé. Il ne s’agit pas non plus de le placer sous tutelle. Le juste milieu entre ces deux extrêmes consisterait dans l’assistance continue du franchisé. Cette assistance continue, comme Olivier Gast le préconisait déjà en 1995, doit porter non seulement sur les éléments traditionnels du savoir-faire (transmission des droits de propriété intellectuelle et transmission du concept du franchiseur), mais principalement sur le savoir-faire d’organisation du franchiseur. (Article "Playdoyer pour une révision de la notion de savoir-faire en matière de franchise : "du savoir-faire au savoir-réussir" par Olivier Gast - Les Petites Affiches - Novembre 1993").
La nécessité de compléter la notion classique du savoir-faire se vérifie également lorsqu’on se place du point de vue de l’ensemble du réseau. En effet, la transmission d’un savoir-faire d’organisation permettrait de rendre compte à la fois de l’ensemble des franchisés et de l’indépendance de chacun en vue du développement harmonieux du réseau entier.
Outre ces éléments, Olivier Gast justifie le besoin de compléter la définition du savoir-faire d’un point de vue juridique. En effet, de manière schématique, le droit d’entrée versé par le franchisé au franchiseur au début du contrat de franchise correspondrait à une première transmission du savoir-faire par le franchiseur portant sur des éléments nécessaires pour le début de son activité. Au cours du contrat, les versements mensuels des royalties correspondraient à la contrepartie de l’assistance continue du franchiseur.
Le nouveau règlement européen d’exemption du 20 avril 2010, au travers d’une généralisation de la notion du savoir-faire (I), semble pouvoir conduire le juge français à faire évoluer la définition du savoir-faire dans les contrats de franchise (II). Il n’en reste pas moins que, outre-Atlantique, le savoir-faire est totalement exclu de la définition de la franchise (III).
Moto-Expert, Movin', Nooï, Un jour Ailleurs, Paul
I. L'approche européenne du savoir-faire dans les contrats de franchise : François Farkas, Juriste, Gast & Menguy
La définition du savoir-faire en France est en pleine évolution. Cela s’explique par l’entrée en vigueur du nouveau règlement européen d’exemption à des catégories d’accords verticaux du 20 avril 2010. La Commission européenne, à l’origine de ce règlement, a cherché, conformément à ses missions, à minimiser les entraves causées par des pratiques anticoncurrentielles ou restrictives de concurrence. Or, les contrats de franchise sont considérés comme étant restrictifs de concurrence. La démarche de la Commission est donc de mesurer les bénéfices et préjudices que ces pratiques anticoncurrentielles ou restrictives de concurrence impliquent à l’économie. A l’issue de ce calcul, la Commission octroi des exemptions aux pratiques dont les bénéfices sont supérieurs aux préjudices. C’est ce raisonnement qui permet l’existence des réseaux de franchise.
Le règlement d’exemption, en ce qui concerne le savoir-faire dans la franchise, présente deux éléments apparemment contradictoires. D’une part, le savoir-faire est inclus dans la définition de « droits de propriété intellectuelle ». D’autre part, le champ d’application du règlement d’exemption est limité aux accords verticaux dont les droits de propriété intellectuelle ne constituent pas l’objet principal de cet accord.
On s’est donc interrogé sur la pertinence d’une définition du savoir-faire reliée aux droits de propriété intellectuelle. Une explication à ce propos a été avancée par les rédacteurs du règlement, cela consistait à dire que la définition actuelle du savoir-faire correspondait à un essai de syntonie avec la définition donnée par l’OMC. En effet, l’Organisation Mondiale du Commerce avait d’ores et déjà défini le savoir-faire en tant qu’un droit de propriété intellectuelle, composée de deux éléments : le secret et la valeur commerciale du savoir-faire. Les rédacteurs se veulent néanmoins rassurants, selon eux, cette définition n’a pas pour objet de limiter l’exemption des accords portant sur la transmission du savoir-faire.
Le législateur français, quant à lui, n’a pas définit le savoir-faire. C’est en l’absence de législation sur le savoir-faire que le juge français s’est rapproché de la législation de l’Union européenne.
La définition du savoir-faire tirée du règlement actuel est la suivante :
« […] un ensemble secret, substantiel et identifié d’informations pratiques non brevetées, résultant de l’expérience du fournisseur et testées par celui-ci ; dans ce contexte, « secret » signifie que le savoir-faire n’est pas généralement connu ou facilement accessible ; « substantiel » se réfère au savoir-faire qui est significatif et utile à l’acheteur aux fins de l’utilisation, de la vente ou de la revente des biens ou des services contractuels ; « identifié » signifie que le savoir-faire est décrit d’une façon suffisamment complète pour permettre de vérifier s’il remplit les conditions de secret et de substantialité ».
Ainsi que la définition donnée par l’ancien règlement, la nouvelle définition du savoir-faire comporte les mêmes trois critères essentiels pour déterminer l’existence d’un savoir-faire. La nouveauté du règlement actuel réside, en réalité, dans une précision sur comment il faut interpréter le critère de substantialité. Alors que l’ancien règlement exigeait que le critère substantiel soit « significatif et indispensable », désormais, il ne doit plus être que « significatif et utile ».
Lors d’une première lecture du nouveau règlement, d’aucuns auraient pu croire qu’il s’agissait d’une nuance anodine. Toutefois, nos intervenants ont démontré les conséquences possibles et importantes de ce « léger » changement qui ne manquera pas de banaliser le savoir-faire dans la jurisprudence française.
François Farkas a remarqué les trois conséquences immédiates de la nouvelle rédaction du règlement d’exemption. Il s’agit notamment :
1. D’un élargissement de la notion même du savoir-faire ;
2. D’un assouplissement du degré d’exigence du savoir-faire à la charge du franchiseur;
3. De la globalisation de la notion de savoir-faire :
Le règlement d’exemption, en ce qui concerne le savoir-faire dans la franchise, présente deux éléments apparemment contradictoires. D’une part, le savoir-faire est inclus dans la définition de « droits de propriété intellectuelle ». D’autre part, le champ d’application du règlement d’exemption est limité aux accords verticaux dont les droits de propriété intellectuelle ne constituent pas l’objet principal de cet accord.
On s’est donc interrogé sur la pertinence d’une définition du savoir-faire reliée aux droits de propriété intellectuelle. Une explication à ce propos a été avancée par les rédacteurs du règlement, cela consistait à dire que la définition actuelle du savoir-faire correspondait à un essai de syntonie avec la définition donnée par l’OMC. En effet, l’Organisation Mondiale du Commerce avait d’ores et déjà défini le savoir-faire en tant qu’un droit de propriété intellectuelle, composée de deux éléments : le secret et la valeur commerciale du savoir-faire. Les rédacteurs se veulent néanmoins rassurants, selon eux, cette définition n’a pas pour objet de limiter l’exemption des accords portant sur la transmission du savoir-faire.
Le législateur français, quant à lui, n’a pas définit le savoir-faire. C’est en l’absence de législation sur le savoir-faire que le juge français s’est rapproché de la législation de l’Union européenne.
La définition du savoir-faire tirée du règlement actuel est la suivante :
« […] un ensemble secret, substantiel et identifié d’informations pratiques non brevetées, résultant de l’expérience du fournisseur et testées par celui-ci ; dans ce contexte, « secret » signifie que le savoir-faire n’est pas généralement connu ou facilement accessible ; « substantiel » se réfère au savoir-faire qui est significatif et utile à l’acheteur aux fins de l’utilisation, de la vente ou de la revente des biens ou des services contractuels ; « identifié » signifie que le savoir-faire est décrit d’une façon suffisamment complète pour permettre de vérifier s’il remplit les conditions de secret et de substantialité ».
Ainsi que la définition donnée par l’ancien règlement, la nouvelle définition du savoir-faire comporte les mêmes trois critères essentiels pour déterminer l’existence d’un savoir-faire. La nouveauté du règlement actuel réside, en réalité, dans une précision sur comment il faut interpréter le critère de substantialité. Alors que l’ancien règlement exigeait que le critère substantiel soit « significatif et indispensable », désormais, il ne doit plus être que « significatif et utile ».
Lors d’une première lecture du nouveau règlement, d’aucuns auraient pu croire qu’il s’agissait d’une nuance anodine. Toutefois, nos intervenants ont démontré les conséquences possibles et importantes de ce « léger » changement qui ne manquera pas de banaliser le savoir-faire dans la jurisprudence française.
François Farkas a remarqué les trois conséquences immédiates de la nouvelle rédaction du règlement d’exemption. Il s’agit notamment :
1. D’un élargissement de la notion même du savoir-faire ;
2. D’un assouplissement du degré d’exigence du savoir-faire à la charge du franchiseur;
3. De la globalisation de la notion de savoir-faire :
Me Olivia Gast, Avocat à la Cour, Gast & Menguy
II. L'approche jurisprudentielle française du savoir-faire dans les contrats de franchise : Maître Olivia Gast et Maître Gilles Menguy, Avocats à la Cour, Gast & Menguy
L’implication pratique de ces conséquences pour les franchiseurs tient à la limitation du risque de voir un contrat de franchise frappé de nullité en raison d’une prétendue inexistence du savoir-faire. Auparavant, sous l’ancien règlement, le franchiseur était tenu de démontrer les informations indispensables de son savoir-faire. Le nouveau règlement facilitera la défense (le travail des avocats des franchiseurs) dans la mesure où le terme utile appréhende le savoir-faire d’une manière plus générale et plus « dégradée ». Il y a une nuance sémantique remarquable entre indispensable et utile !
Olivia Gast et François Farkas ont analysé l’implication de l’assouplissement du critère de substantialité dans l’évolution future de la jurisprudence française. Cependant et pour parler du « sexe des anges ! », une série de décisions, communément désignées comme « Affaires Pétrin Ribeirou » représente l’exemple même de la remise en cause du savoir-faire lors de la contestation de la validité d’un contrat de franchise. Cette série de décisions est survenue en trois temps :
1. En 2009, la Cour d’appel de Dijon statue que le savoir-faire existe lorsqu’un néophyte a pu en profiter. Cette appréciation a été confirmée par la Cour de cassation dans l’arrêt du 1er mars 2011.
2. Dans un deuxième temps, la Cour d’appel de Besançon, par un arrêt du 9 avril 2010 a statué sur le manque de preuve de l’inexistence du savoir-faire. La Cour de cassation a suivit le raisonnement de la Cour d’appel dans une décision du 20 septembre 2011.
3. Dans un troisième temps, malgré les indices précédents allant dans le sens de la facilitation de la preuve du savoir-faire, la Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 09 février 2011, s’est prononcée pour la nullité des contrats de franchise Pétrin-Ribeirou en raison de l’inexistence du Savoir-faire du franchiseur.
Selon Olivia Gast, il s’agit d’une période d’incertitude, en attendant que la Cour de cassation se prononce. L’explication de la divergence entre l’arrêt de la Cour d’appel de Paris et les arrêts d’autres Cours d’appel (notamment celui de la Cour d’appel de Dijon, 17 décembre 2009), ainsi que leurs respectives confirmations par la Cour de cassation, peut s’expliquer par l’approche in concreto des juges du fond. L’arrêt du 09 février 2011 de la Cour d’appel de Paris fait, en effet, abstraction d’une certaine nécessité d’observation et d’interprétation. Toujours est-il que, en attendant que la Cour de cassation tranche définitivement la situation de l’appréciation de l’existence du Savoir-faire, il n’y aurait pas lieu de s’alarmer quant à une éventuelle insécurité juridique. Il existe déjà une série d’arrêts récents de Cours d’appels qui refusent d’annuler des contrats de franchise en raison d’une prétendue absence de savoir-faire. Olivia Gast cite à nouveau, par exemple :
- Cour d’appel de Dijon, 17 décembre 2009
- Cour d’appel de Besançon, 09 avril 2010
- Cour d’appel de Douai, 20 janvier 2011
Toutefois, si on revient à l’arrêt de la Cour d’appel de Paris, on relève une vraie bataille d’experts (« sur le sexe des anges ! »), car le problème majeur de l’existence du savoir-faire repose sur l’analyse d’un procédé dans l’affaire Pétrin-Ribeirou, il s’agissait d’un procédé de panification dans une boulangerie artisanale.
Cet exposé a suscité la question d’un directeur de réseau, qui s’interrogeait sur les conséquences d’une éventuelle annulation d’un contrat de franchise sur d’autres franchisés du réseau, parfois même situés dans d’autres pays. Plusieurs branches de réponses ont pu être relevées : tout d’abord, plus le nombre de franchisés est important, plus ce sera facile de démontrer l’existence du savoir-faire à l’expert. En second lieu, s’agissant de l’application de la définition du savoir-faire issue d’un règlement européen, le juge français pourrait renvoyer à une « question préjudicielle », devant la Cour de justice européenne du Luxembourg. Cette procédure du renvoi préjudiciel vise à l’application uniforme du droit européen dans tous les Etats membres. Enfin, il ne faudrait pas oublier que le savoir-faire doit aussi être adapté dans différents marchés. L’expérience du franchiseur n’étant pas toujours valable en tout lieu.
Il est donc conseillé aux franchiseurs de compléter au maximum les manuels opératoires et les documents d’information précontractuelle de façon à ce que la globalité du savoir-faire puisse être prise en compte. Olivier Gast a, par ailleurs, rappelé que dans les années 1980 les franchiseurs ne faisaient pas vraiment attention à l’écriture « des bibles », qui consistaient souvent dans des photocopies de livres de gestions et de droits !!!
Les différentes solutions rendues par les Cours d’appel précitées ont pour conséquence de rendre plus sensible la notion de savoir-faire et de ce débat typiquement français du « sexe des anges » (Voir le blog de septembre d’Olivier Gast « Franchise, savoir-faire et sexe des anges ! »)
Pour Gilles Menguy, la différence dans le raisonnement du juge parisien qu’il considère comme pertinent aussi, consiste dans la distinction de deux types de savoir-faire. Alors que les juges des Cours d’appel de Dijon et Besançon cherchaient à établir un savoir-faire fondé sur le procédé du métier du franchiseur, le juge parisien va lui au-delà et cherche à établir un savoir-faire lié à la technique et aux procédés commerciaux fondements de la réussite d’une boulangerie. Une certaine cohérence peut tout de même être retrouvée dans ces deux raisonnements, il semblerait que les Cours d’appel de Dijon et Besançon aient retenue la différence entre les deux sortes de savoir-faire, mais, auraient opté pour une plus grande tolérance à l’égard du savoir-faire technique et concernant les procédés commerciaux.
En outre, il convient de rappeler que l’intensité du contentieux sur le thème de la franchise à Paris, confère une certaine qualité de raisonnement aux juges parisiens. En tout état de cause, le professionnalisme exigé des franchiseurs a lieu dès l’écriture des manuels opératoires. Comme l’a dit Me Menguy « on ne peut plus se contenter de les faire rédiger par des stagiaires de l’école de HEC ».
Olivia Gast et François Farkas ont analysé l’implication de l’assouplissement du critère de substantialité dans l’évolution future de la jurisprudence française. Cependant et pour parler du « sexe des anges ! », une série de décisions, communément désignées comme « Affaires Pétrin Ribeirou » représente l’exemple même de la remise en cause du savoir-faire lors de la contestation de la validité d’un contrat de franchise. Cette série de décisions est survenue en trois temps :
1. En 2009, la Cour d’appel de Dijon statue que le savoir-faire existe lorsqu’un néophyte a pu en profiter. Cette appréciation a été confirmée par la Cour de cassation dans l’arrêt du 1er mars 2011.
2. Dans un deuxième temps, la Cour d’appel de Besançon, par un arrêt du 9 avril 2010 a statué sur le manque de preuve de l’inexistence du savoir-faire. La Cour de cassation a suivit le raisonnement de la Cour d’appel dans une décision du 20 septembre 2011.
3. Dans un troisième temps, malgré les indices précédents allant dans le sens de la facilitation de la preuve du savoir-faire, la Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 09 février 2011, s’est prononcée pour la nullité des contrats de franchise Pétrin-Ribeirou en raison de l’inexistence du Savoir-faire du franchiseur.
Selon Olivia Gast, il s’agit d’une période d’incertitude, en attendant que la Cour de cassation se prononce. L’explication de la divergence entre l’arrêt de la Cour d’appel de Paris et les arrêts d’autres Cours d’appel (notamment celui de la Cour d’appel de Dijon, 17 décembre 2009), ainsi que leurs respectives confirmations par la Cour de cassation, peut s’expliquer par l’approche in concreto des juges du fond. L’arrêt du 09 février 2011 de la Cour d’appel de Paris fait, en effet, abstraction d’une certaine nécessité d’observation et d’interprétation. Toujours est-il que, en attendant que la Cour de cassation tranche définitivement la situation de l’appréciation de l’existence du Savoir-faire, il n’y aurait pas lieu de s’alarmer quant à une éventuelle insécurité juridique. Il existe déjà une série d’arrêts récents de Cours d’appels qui refusent d’annuler des contrats de franchise en raison d’une prétendue absence de savoir-faire. Olivia Gast cite à nouveau, par exemple :
- Cour d’appel de Dijon, 17 décembre 2009
- Cour d’appel de Besançon, 09 avril 2010
- Cour d’appel de Douai, 20 janvier 2011
Toutefois, si on revient à l’arrêt de la Cour d’appel de Paris, on relève une vraie bataille d’experts (« sur le sexe des anges ! »), car le problème majeur de l’existence du savoir-faire repose sur l’analyse d’un procédé dans l’affaire Pétrin-Ribeirou, il s’agissait d’un procédé de panification dans une boulangerie artisanale.
Cet exposé a suscité la question d’un directeur de réseau, qui s’interrogeait sur les conséquences d’une éventuelle annulation d’un contrat de franchise sur d’autres franchisés du réseau, parfois même situés dans d’autres pays. Plusieurs branches de réponses ont pu être relevées : tout d’abord, plus le nombre de franchisés est important, plus ce sera facile de démontrer l’existence du savoir-faire à l’expert. En second lieu, s’agissant de l’application de la définition du savoir-faire issue d’un règlement européen, le juge français pourrait renvoyer à une « question préjudicielle », devant la Cour de justice européenne du Luxembourg. Cette procédure du renvoi préjudiciel vise à l’application uniforme du droit européen dans tous les Etats membres. Enfin, il ne faudrait pas oublier que le savoir-faire doit aussi être adapté dans différents marchés. L’expérience du franchiseur n’étant pas toujours valable en tout lieu.
Il est donc conseillé aux franchiseurs de compléter au maximum les manuels opératoires et les documents d’information précontractuelle de façon à ce que la globalité du savoir-faire puisse être prise en compte. Olivier Gast a, par ailleurs, rappelé que dans les années 1980 les franchiseurs ne faisaient pas vraiment attention à l’écriture « des bibles », qui consistaient souvent dans des photocopies de livres de gestions et de droits !!!
Les différentes solutions rendues par les Cours d’appel précitées ont pour conséquence de rendre plus sensible la notion de savoir-faire et de ce débat typiquement français du « sexe des anges » (Voir le blog de septembre d’Olivier Gast « Franchise, savoir-faire et sexe des anges ! »)
Pour Gilles Menguy, la différence dans le raisonnement du juge parisien qu’il considère comme pertinent aussi, consiste dans la distinction de deux types de savoir-faire. Alors que les juges des Cours d’appel de Dijon et Besançon cherchaient à établir un savoir-faire fondé sur le procédé du métier du franchiseur, le juge parisien va lui au-delà et cherche à établir un savoir-faire lié à la technique et aux procédés commerciaux fondements de la réussite d’une boulangerie. Une certaine cohérence peut tout de même être retrouvée dans ces deux raisonnements, il semblerait que les Cours d’appel de Dijon et Besançon aient retenue la différence entre les deux sortes de savoir-faire, mais, auraient opté pour une plus grande tolérance à l’égard du savoir-faire technique et concernant les procédés commerciaux.
En outre, il convient de rappeler que l’intensité du contentieux sur le thème de la franchise à Paris, confère une certaine qualité de raisonnement aux juges parisiens. En tout état de cause, le professionnalisme exigé des franchiseurs a lieu dès l’écriture des manuels opératoires. Comme l’a dit Me Menguy « on ne peut plus se contenter de les faire rédiger par des stagiaires de l’école de HEC ».
III. L'approche américaine du savoir-faire dans les contrats de franchise
Afin de répondre à la question initiale de l’atelier consistant à comprendre pourquoi le savoir-faire ne fait pas partie de la définition ni de la règlementation américaine de la franchise, Andrew Caffey, avocat à Washington DC et spécialiste américain de la franchise a apporté sa contribution au débat.
Si on compare la définition française avec la définition américaine de la franchise, on se rend compte que la dernière exclut la notion de savoir-faire. Les éléments d’un contrat de franchise américain sont les suivants :
- un accord sur droit d’usage d’une marque ;
- un contrôle significatif sur les franchisés ;
- le paiement d’un droit d’entrée supérieur à 500$.
Malgré cette absence de notion de savoir-faire dans la définition américaine de la franchise, on la retrouve cependant incarnée dans d’autres éléments opérationnels de la franchise. Ainsi, la protection du savoir-faire passe par le droit des marques, par le copyright, les brevets, les habillages commerciaux, les secrets de fabrication et la confidentialité.
Si on se tient à la définition du savoir-faire, on s’aperçoit que la définition américaine est peut-être un peu moins précise que la définition française ; mais peut-être plus réaliste aussi. Certains éléments du contenu du savoir-faire aux Etats-Unis sont toutefois les mêmes qu’en France. Il s’agit notamment des éléments suivants :
- les tables des matières du manuel opératoire ;
- les détails du programme de formation des franchisés ;
- l’expérience du franchiseur et de ses managers ;
- l’information sur les marques, copyrights et brevets
En général, le point de vue des juges américains consiste à ne pas vérifier qu’une franchise est « raisonnable, juste, ou équitable », ni si le savoir-faire est approprié. La logique américaine repose plutôt sur la confiance aux marchés qui jugeront et décideront au final sur la substance de la franchise. Le problème en droit français quant à l’évolution du savoir-faire dans le contrat de franchise existe également dans la logique américaine. Néanmoins, le raisonnement transatlantique met l’accent plutôt sur des aspects qui tient à la transparence dans la relation franchiseur-franchisé. Andrew Caffey a rappelé que la responsabilité d’évaluer une franchise afin de s’assurer qu’elle possède suffisamment de savoir-faire revient à l’investisseur. Pour ce faire, l’investisseur comptera sur le document d’information précontractuelle, qui devra lui permettre de procéder à une évaluation précise de la franchise en question.
Andrew Caffey a terminé son exposé par une analogie du droit américain de la franchise avec l’image des cowboys. Il s’agit par là de souligner les caractéristiques d’un droit développé hors des régulateurs et du contrôle des magistrats.
(Voir aussi le texte de l’intervention d’Andrew Caffey)
Si on compare la définition française avec la définition américaine de la franchise, on se rend compte que la dernière exclut la notion de savoir-faire. Les éléments d’un contrat de franchise américain sont les suivants :
- un accord sur droit d’usage d’une marque ;
- un contrôle significatif sur les franchisés ;
- le paiement d’un droit d’entrée supérieur à 500$.
Malgré cette absence de notion de savoir-faire dans la définition américaine de la franchise, on la retrouve cependant incarnée dans d’autres éléments opérationnels de la franchise. Ainsi, la protection du savoir-faire passe par le droit des marques, par le copyright, les brevets, les habillages commerciaux, les secrets de fabrication et la confidentialité.
Si on se tient à la définition du savoir-faire, on s’aperçoit que la définition américaine est peut-être un peu moins précise que la définition française ; mais peut-être plus réaliste aussi. Certains éléments du contenu du savoir-faire aux Etats-Unis sont toutefois les mêmes qu’en France. Il s’agit notamment des éléments suivants :
- les tables des matières du manuel opératoire ;
- les détails du programme de formation des franchisés ;
- l’expérience du franchiseur et de ses managers ;
- l’information sur les marques, copyrights et brevets
En général, le point de vue des juges américains consiste à ne pas vérifier qu’une franchise est « raisonnable, juste, ou équitable », ni si le savoir-faire est approprié. La logique américaine repose plutôt sur la confiance aux marchés qui jugeront et décideront au final sur la substance de la franchise. Le problème en droit français quant à l’évolution du savoir-faire dans le contrat de franchise existe également dans la logique américaine. Néanmoins, le raisonnement transatlantique met l’accent plutôt sur des aspects qui tient à la transparence dans la relation franchiseur-franchisé. Andrew Caffey a rappelé que la responsabilité d’évaluer une franchise afin de s’assurer qu’elle possède suffisamment de savoir-faire revient à l’investisseur. Pour ce faire, l’investisseur comptera sur le document d’information précontractuelle, qui devra lui permettre de procéder à une évaluation précise de la franchise en question.
Andrew Caffey a terminé son exposé par une analogie du droit américain de la franchise avec l’image des cowboys. Il s’agit par là de souligner les caractéristiques d’un droit développé hors des régulateurs et du contrôle des magistrats.
(Voir aussi le texte de l’intervention d’Andrew Caffey)