La distribution sélective et la franchise
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B. Le Règlement d'exemption par catégories du 22/12/1999 et la distribution sélective
Il est intéressant de rappeler quelle a été l'approche de la Commission dans l'élaboration du Règlement et des lignes directrices qui l'accompagnent (1), avant d'examiner les dispositions de ce nouveau Règlement applicables à la distribution sélective et tenter d'apprécier en quoi elles renforcent la liberté et la sécurité juridique des entreprises et à quelles conditions (2).
1) L'approche de la Commission et le contexte de modernisation des règles d'application des articles 81 et 82
a) L'approche résolument économique de la Commission
C'est vraisemblablement à la fois à une évolution de la philosophie de la Commission en matière de restriction de concurrence et à son souhait de se concentrer sur des affaires importantes, gros cartels ou aides d'État, comme l'a réaffirmé récemment M. Mario Monti, Commissaire européen chargé de la concurrence, que l'on doit le nouveau Règlement d'exemption par catégories applicable aux accords verticaux.
La Commission a, pendant longtemps, été marquée par la conception allemande de la restriction de concurrence (que les Allemands ont abandonné depuis lors) et qui consiste à considérer comme une restriction de concurrence toute restriction à la liberté d'agir.
Le champ d'application d'un tel concept est très étendu puisqu'il y a restriction de concurrence dès lors qu'une clause contractuelle restreint la liberté d'agir de l'une des parties au contrat.
Dans un tel contexte, la politique de la Commission a consisté, pendant des années, une fois la restriction de concurrence constatée, à l'exempter dans la plupart des cas.
Cette approche purement juridique et trop formaliste a prévalu dans les Règlements d'exemption par catégories: distribution exclusive, franchise, achats exclusifs.
Elle a conduit la Commission « à écrire» les contrats pour les opérateurs économiques, les Règlements comportant des listes de clauses « noires », «blanches» et « grises» (c'est-à-dire prohibées, autorisées ou tolérées) applicables sans aucune considération du pouvoir de marché des entreprises et, donc, des effet de leurs contrats sur le marché en cause.
C'est ce avec quoi la Commission a voulu rompre en dénonçant les « straight jackets» dans lesquelles ces Règlements enfermaient les entreprises.
Le contrôle ainsi opéré par la Commission faisait la part trop belle à la concurrence intra-marque au détriment de la concurrence inter-marques.
Les accords conclus entre entreprises disposant d'un pouvoir de marché étaient, eux insuffisamment contrôlés. En cas de problème, la seule option consistait dans le retrait de l'exemption.
Si, très tôt, la CJCE avait invité la Commission à procéder à une analyse économique du marché pertinent en termes de concurrence, il n'y a guère que dans le cadre d'exemptions individuelles que cette dernière a suivi ces recommandations.
La Commission a, donc, évolué et reconnu qu'une restriction à la liberté d'agir n'était pas suffisante en soi pour apprécier la situation de la concurrence sur un marché donné.
L'approche légaliste s'efface, donc, pour faire place à une approche plus économique laquelle vise à apprécier les effets d'un accord sur la structure du marché où il est mis en œuvre.
En d'autres termes, si la restriction de concurrence peut trouver son origine dans une restriction à la liberté d'agir (par exemple une clause de non-concurrence imposée à l'une des parties au contrat), c'est une condition nécessaire pour constater cette restriction mais pas suffisante pour l'interdire.
Les clauses contractuelles sont appréciées non en elles-mêmes mais pour leurs effets sur un marché donné.
Les mêmes clauses peuvent avoir un effet différent selon qu'elles sont mises en œuvre par une entreprise ayant ou non un « pouvoir de marché » lequel, faute de mieux, est mesuré au moyen de la part de marché détenue par l'entreprise sur son marché pertinent.
1) L'approche de la Commission et le contexte de modernisation des règles d'application des articles 81 et 82
a) L'approche résolument économique de la Commission
C'est vraisemblablement à la fois à une évolution de la philosophie de la Commission en matière de restriction de concurrence et à son souhait de se concentrer sur des affaires importantes, gros cartels ou aides d'État, comme l'a réaffirmé récemment M. Mario Monti, Commissaire européen chargé de la concurrence, que l'on doit le nouveau Règlement d'exemption par catégories applicable aux accords verticaux.
La Commission a, pendant longtemps, été marquée par la conception allemande de la restriction de concurrence (que les Allemands ont abandonné depuis lors) et qui consiste à considérer comme une restriction de concurrence toute restriction à la liberté d'agir.
Le champ d'application d'un tel concept est très étendu puisqu'il y a restriction de concurrence dès lors qu'une clause contractuelle restreint la liberté d'agir de l'une des parties au contrat.
Dans un tel contexte, la politique de la Commission a consisté, pendant des années, une fois la restriction de concurrence constatée, à l'exempter dans la plupart des cas.
Cette approche purement juridique et trop formaliste a prévalu dans les Règlements d'exemption par catégories: distribution exclusive, franchise, achats exclusifs.
Elle a conduit la Commission « à écrire» les contrats pour les opérateurs économiques, les Règlements comportant des listes de clauses « noires », «blanches» et « grises» (c'est-à-dire prohibées, autorisées ou tolérées) applicables sans aucune considération du pouvoir de marché des entreprises et, donc, des effet de leurs contrats sur le marché en cause.
C'est ce avec quoi la Commission a voulu rompre en dénonçant les « straight jackets» dans lesquelles ces Règlements enfermaient les entreprises.
Le contrôle ainsi opéré par la Commission faisait la part trop belle à la concurrence intra-marque au détriment de la concurrence inter-marques.
Les accords conclus entre entreprises disposant d'un pouvoir de marché étaient, eux insuffisamment contrôlés. En cas de problème, la seule option consistait dans le retrait de l'exemption.
Si, très tôt, la CJCE avait invité la Commission à procéder à une analyse économique du marché pertinent en termes de concurrence, il n'y a guère que dans le cadre d'exemptions individuelles que cette dernière a suivi ces recommandations.
La Commission a, donc, évolué et reconnu qu'une restriction à la liberté d'agir n'était pas suffisante en soi pour apprécier la situation de la concurrence sur un marché donné.
L'approche légaliste s'efface, donc, pour faire place à une approche plus économique laquelle vise à apprécier les effets d'un accord sur la structure du marché où il est mis en œuvre.
En d'autres termes, si la restriction de concurrence peut trouver son origine dans une restriction à la liberté d'agir (par exemple une clause de non-concurrence imposée à l'une des parties au contrat), c'est une condition nécessaire pour constater cette restriction mais pas suffisante pour l'interdire.
Les clauses contractuelles sont appréciées non en elles-mêmes mais pour leurs effets sur un marché donné.
Les mêmes clauses peuvent avoir un effet différent selon qu'elles sont mises en œuvre par une entreprise ayant ou non un « pouvoir de marché » lequel, faute de mieux, est mesuré au moyen de la part de marché détenue par l'entreprise sur son marché pertinent.
Pour qu'il y ait restriction de concurrence il faut, donc, qu'il y ait un impact sur le marché. Pour évaluer cet impact, il faut à la fois :
• définir le marché pertinent (21) (« produits: substituabilité fonction - prix - image)
(« géographique » : conditions de concurrence homogènes),
• placer l'accord dans le contexte du marché, c'est-à-dire apprécier, outre la position du fournisseur lui-même, des éléments tels que la situation des cocontractants, celle des acheteurs, la concurrence potentielle (c'est-à-dire l'existence d'éventuelles barrières à j'entrée), la maturité du marché, etc.
Les objectifs affichés par la Commission ont, donc, été de :
• rendre une plus grande liberté aux entreprises ne disposant pas d'un pouvoir de marché,
• améliorer leur sécurité juridique en assurant une protection plus efficace de la concurrence,
• simplifier le cadre réglementaire et le contrôle administratif.
---> D'où l'adoption d'un Règlement unique applicable à tous les accords verticaux: distribution sélective, distribution exclusive, franchise, accords d'achats exclusifs, avec :
- un seuil en parts de marché fixé à 30 %,
- une liste de « clauses noires»,
- des dispositions relatives au retrait d'exemption dans les cas d'effet cumulatif de faisceaux parallèles d'accords similaires.
Ce Règlement est accompagné de « lignes directrices» qui sans avoir de force juridique contraignante, constituent une grille de lecture du Règlement pour les autorités de concurrence et les juridictions nationales et un instrument d'auto-évaluation de leurs accords pour les entreprises. Leur importance sera d'autant plus grande que leur application interviendra dans un contexte de décentralisation du droit communautaire.
---> D'où la modification du Règlement n' 17 du 6 février 1962 qui supprime le caractère obligatoire de la notification et fait rétroagir le bénéfice de l'exemption à la date de conclusion de l'accord visé.
• définir le marché pertinent (21) (« produits: substituabilité fonction - prix - image)
(« géographique » : conditions de concurrence homogènes),
• placer l'accord dans le contexte du marché, c'est-à-dire apprécier, outre la position du fournisseur lui-même, des éléments tels que la situation des cocontractants, celle des acheteurs, la concurrence potentielle (c'est-à-dire l'existence d'éventuelles barrières à j'entrée), la maturité du marché, etc.
Les objectifs affichés par la Commission ont, donc, été de :
• rendre une plus grande liberté aux entreprises ne disposant pas d'un pouvoir de marché,
• améliorer leur sécurité juridique en assurant une protection plus efficace de la concurrence,
• simplifier le cadre réglementaire et le contrôle administratif.
---> D'où l'adoption d'un Règlement unique applicable à tous les accords verticaux: distribution sélective, distribution exclusive, franchise, accords d'achats exclusifs, avec :
- un seuil en parts de marché fixé à 30 %,
- une liste de « clauses noires»,
- des dispositions relatives au retrait d'exemption dans les cas d'effet cumulatif de faisceaux parallèles d'accords similaires.
Ce Règlement est accompagné de « lignes directrices» qui sans avoir de force juridique contraignante, constituent une grille de lecture du Règlement pour les autorités de concurrence et les juridictions nationales et un instrument d'auto-évaluation de leurs accords pour les entreprises. Leur importance sera d'autant plus grande que leur application interviendra dans un contexte de décentralisation du droit communautaire.
---> D'où la modification du Règlement n' 17 du 6 février 1962 qui supprime le caractère obligatoire de la notification et fait rétroagir le bénéfice de l'exemption à la date de conclusion de l'accord visé.
b) Le contexte de modernisation des règles d'application des articles 81 et 82
L'application de ce Règlement interviendra dans un contexte de décentralisation, au profit des autorités de concurrence et juridictions nationales, de la mise en œuvre des articles 81, § 1et 81, §3.
En effet, depuis plus d'un an la Commission travaille à la modernisation des règles d'application des articles 81 et 82 du Traité.
Pourrait se substituer au régime actuel dans lequel la Commission CE dispose du monopole d'application de l'article 81, § 3, un système «d'exception légale" dans lequel les États membres pourraient appliquer, concurremment avec la Commission, les articles 81, § 1et 81, § 3.
L'application de ce Règlement interviendra dans un contexte de décentralisation, au profit des autorités de concurrence et juridictions nationales, de la mise en œuvre des articles 81, § 1et 81, §3.
En effet, depuis plus d'un an la Commission travaille à la modernisation des règles d'application des articles 81 et 82 du Traité.
Pourrait se substituer au régime actuel dans lequel la Commission CE dispose du monopole d'application de l'article 81, § 3, un système «d'exception légale" dans lequel les États membres pourraient appliquer, concurremment avec la Commission, les articles 81, § 1et 81, § 3.
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(21) V. entre autres L. Bidaud, Le marché pertinent, Bibl. dr. entre., n° 51, Litec 2000.
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